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Le Cœur supplicié 


Mon triste cœur bave à la poupe...
Mon cœur est plein de caporal !
Ils y lancent des jets de soupe,
Mon triste cœur bave à la poupe...
Sous les quolibets de la troupe
Qui lance un rire général,
Mon triste cœur bave à la poupe,
Mon cœur est plein de caporal !

Ithyphalliques et pioupiesques
Leurs insultes l'ont dépravé ;
À la vesprée, ils font des fresques
Ithyphalliques et pioupiesques ;
Ô flots abracadabrantesques,
Prenez mon cœur, qu'il soit sauvé !
Ithyphalliques et pioupiesques,
Leurs insultes l'ont dépravé.

Quand ils auront tari leurs chiques,
Comment agir, ô cœur volé ?
Ce seront des refrains bachiques
Quand ils auront tari leurs chiques !
J'aurai des sursauts stomachiques
Si mon cœur triste est ravalé !
Quand ils auront tari leurs chiques,
Comment agir, ô cœur volé ?

 

journaux

 

Le texte est beau, une fois décortiqué l'image moins.

Nous sommes ici pour nous amuser et jouer (pas du malheur) jouer dans le contexte de 6 sens.

 

Gaffe.

 

Alors un petit scénario de "viol" (c'est un jeu).

Le contexte vous entrez à l'improviste dans une maison

elle (il) est là.

Votre concupiscence... Montrez lui que vous desirez ce corps et abusez...

 



 

 

Le cœur supplicié1 : Trois versions ultérieures et différentes de ce poème nous sont connues. Le 10 juin 1871, Rimbaud envoie une lettre à Demeny contenant Le Cœur du pitre : ce nouveau titre met en relief l'identité du narrateur, le pitre, c'est à dire le clown, l'histrion, le funambule, le poète. En août 1871, Delahaye recopie pour Rimbaud une nouvelle version destinée à Verlaine intitulée Le Coeur volé : ce titre met semble-t-il davantage l'accent sur l'idée de viol, et sur les conséquences morales des violences subies par le narrateur. Verlaine, enfin, fait figurer dans Les Poètes maudits (1886), sous le titre Le Cœur volé, une nouvelle version des deux premiers triolets. Le mot "cœur" est repris dans toutes les versions, ce qui tend à confirmer le rôle central de ce mot, dans ses différents sens.

 1)     Le Cœur supplicié : Trois versions ultérieures et différentes de ce poème nous sont connues. Le 10 juin 1871, Rimbaud envoie une lettre à Demeny contenant Le Cœur du pitre : ce nouveau titre met en relief l'identité du narrateur, le pitre, c'est à dire le clown, l'histrion, le funambule, le poète. En août 1871, Delahaye recopie pour Rimbaud une nouvelle version destinée à Verlaine intitulée Le Coeur volé : ce titre met semble-t-il davantage l'accent sur l'idée de viol, et sur les conséquences morales des violences subies par le narrateur. Verlaine, enfin, fait figurer dans Les Poètes maudits (1886), sous le titre Le Cœur volé, une nouvelle version des deux premiers triolets. Le mot "cœur" est repris dans toutes les versions, ce qui tend à confirmer le rôle central de ce mot, dans ses différents sens.

 

« Mon triste cœur2 bave à la poupe3 ». Secoué, renversé comme un bateau qui chavire, le poète est supplicié par l’arrière. 

2)     Cœur : le mot est polysémique : organe de la circulation du sang / estomac (avoir mal au cœur) / siège de la sensibilité morale, des sentiments (Baudelaire : Mon cœur mis à nu; Rimbaud : « Je ne regrette pas le siècle des cœurs sensibles ». Mauvais sang) / bonté (avoir du cœur, avoir le cœur sur la main, « Ce sans-cœur de Rimbaud » - signature d'une lettre à Izambard) / amour (donner son cœur) / courage (avoir du cœur au ventre) / etc. Dans sa nouvelle licencieuse Un cœur sous une soutane et dans certains de ses poèmes, Rimbaud utilise ce terme de façon équivoque, avec de constantes allusions sexuelles. Voir par exemple ce quatrain d'Oraison du soir : « Tels que les excréments chauds d'un vieux colombier, / Mille rêves en moi font de douces brûlures : / Puis par instants mon cœur triste est comme un aubier / Qu'ensanglante l'or jeune et sombre des coulures. » (symboles phalliques conjugués du cœur triste et de l'arbre printanier). Dans leur article Les zolismes de Rimbaud, Marc Ascione et Jean-Pierre Chambon l'affirment et le démontrent définitivement : « d'une manière générale dans l'œuvre de Rimbaud tout entière, le cœur désigne le sexe de l'homme » (Revue Europe, numéro spécial Rimbaud, mai-juin 1973, pages 114-132). 

3)     Poupe : l'arrière d'un navire, par opposition à la proue.

 

« Mon cœur est plein de caporal4 » ; « couvert de caporal » dans la version remise à Verlaine. Comme le mâle couvre la femelle, le caporal couvre le gamin : seize ans et demi en avril 1871 ; 1,60 m – il gagnera dix-neuf centimètres l’été suivant ; une bouille d’ange ; un air de fille… Mais le caporal, en argot, c’est aussi un tabac à chiquer, un mauvais tabac, qui donne la nausée.  

4)     Caporal : grade militaire; tabac de qualité inférieure.

Les « jets de soupe5 » signalent des crachats ou autre chose. 

5)     Soupe : type de cigarettes, en usage au XIX° siècle d'après Claude Jeancolas (Rimbaud, L'Oeuvre, Textuel, p.100, 2000). Littré donne la définition suivante : « tabac frisé roulé dans une demi-feuille de choix ».

 

« Sous les quolibets6 de la troupe / Qui lance un rire général ». On ne voit pas ce que ça a de drôle. Le sens du viol, ce n’est pas d’avoir un rapport sexuel, puisqu’il n’y a pas de rapport du tout ; c’est de détruire l’autre, en jouant avec, en le cassant. Dans un viol, le pénis est un couteau. 

6)     Quolibets : « Façon de parler basse et triviale, qui renferme ordinairement une mauvaise plaisanterie. Les pointes, les équivoques, les trivialités, les turlupinades, les calembours, les jeux de mots de toute espèce, se confondent sous la dénomination de quolibets » Dictionnaire Bescherelle, cité par Steve Murphy, op. cit. p. 310.

 

« Ithyphalliques7 et pioupiesques8. » En sculpture, ithyphallique se dit d’un nu en érection. Pioupiesque est bâti sur pioupiou, le soldat en argot affectueux. C’étaient sans doute des Communards de la caserne rue de Babylone, où Rimbaud, fugueur, était venu de Charleville participer à la révolte. – Ce vers est tellement inattendu, si sonore et si beau, qu’on en oublierait qu’il a un sens. 

7)     Ithyphalliques : l'ithyphalle est le phallus en érection. Les figures ithyphalliques sont fréquentes dans l'art religieux des civilisations antiques (Égypte, Inde, civilisation gréco-romaine).

 8)     Pioupiesques : Adjectif forgé par Rimbaud à partir de pioupiou : soldat.

Beaucoup d'encre a coulé sur la question de savoir qui pouvaient être les pioupious du texte, et s'il y avait une clé biographique susceptible d'éclairer ce point.

Certains ont vu dans ces soldats des Communards, sur la base d'un témoignage de Delahaye racontant un séjour de Rimbaud à Paris, pendant la Commune, dans une caserne de la garde nationale. Certains ont plutôt vu dans ces soldats, des Versaillais, en s'appuyant sur le contexte historique de 1871 et l'antipathie bien connue de Rimbaud pour le gouvernement de monsieur Thiers.

D'autres ont trouvé plus vraisemblable d'y déceler le souvenir de mauvais traitements qu'aurait subis Rimbaud de la part des gardiens ou de ses co-détenus, lors de son emprisonnement à Mazas en 1870. Antoine Fongaro écrit par exemple : « Je soulignerai, au passage, une phrase de Delahaye parlant du premier voyage de Rimbaud à Paris dans son Rimbaud de 1905 » (cité à la page 177 du livre de Eigeldinger et Gendre, Delahaye, témoin de Rimbaud) : « L'aventureux gamin fut d'abord enfermé dans la cour du Dépôt [...] où il eut à défendre sa vertu contre des voisins qui s'ennuyaient, où je vois, pour ma part, l'origine du poème Le cœur supplicié » (Studi francesi, janvier-avril 1976, p.176-178).

Tout cela reste incertain. La mise au point la plus récente et complète est sans doute celle proposée par Steve Murphy, op. cit. p.286, 5° partie de l'article (Tout ce qu'on a pu inventer : la caserne de Babylone) : l'hypothèse selon laquelle Rimbaud aurait subi un viol à la caserne de Babylone, de la part de soldats communards, en mai 1871 est considérée par ce critique comme entièrement dépourvue de fondement.

 

« Leurs insultes l'ont dépravé9 ; » 

9)     Dépravé : ne se comprend que si l’on se souvient que Rimbaud était encore puceau ; et, du point de vue ecclésial, peu importe comment on a perdu sa virginité, si c’est hors mariage, on est coupable. Du reste, l’abus sexuel n’était pas reconnu comme tel : le sens commun estimait que la victime l’avait cherché.

 

« À la vesprée10 », – « Au gouvernail » dans la version d’octobre, – « ils font des fresques ». Allusion au soir, au fait que le gouvernail, à l’arrière du bateau, en assure la maîtrise et qu’il se tient comme une paire de hanches. Faire des fresques équivaut à refaire les peintures. 

10)   A la vesprée : au soir; terme disparu de la langue moderne mais connu de tous par l'ode célèbre de Ronsard : « Mignonne allons voir si la rose / Qui ce matin avait déclose / Sa robe de pourpre au soleil / A point perdu cette vesprée / Les plis de sa robe pourprée / Et son teint au vôtre pareil.  Antoine Fongaro (op. cit. pages 10-12) signale en outre la présence de ce mot chez Verlaine et chez Gautier. Sa reprise dans le contexte prosaïque de ce poème peut dès lors être attribué à une intention parodique, à l'égard des préciosités de la poésie « subjective ».

 

« Ô flots abracadabrantesques11,/ Prenez mon cœur, qu’il soit sauvé » (ou « lavé »). Un successeur de Napoléon III a repris le mot pour lui donner le sens qui l’arrangeait, sans convaincre ses juges. Abracadabra, c’est la formule magique des contes de fée. Arthur appelle au secours ; il n’espère qu’un miracle pour se remettre à flot. Si sauvé s’applique au cœur, lavé s’applique au fessier. 

  1. 11)   abracadabrantesque : néologisme, adjectif en -esque dérivé de l'adjectif abracadabrant qui dérive lui-même du nom abracadabra. Sens superlatif : supérieurement étonnant, extraordinaire. Suzanne Briet a rapporté que : "Dans la grammaire de son enfance (Grammaire nationale, par Bescherelle aîné), Rimbaud avait glissé un unique signet de papier, recouvert du triangle magique, où « abracadabra » disposait ses voyelles et ses consonnes comme un filet à prendre l'invisible. Et l'enfant avait noté sur le papillon de papier cette phrase : « pour préserver de la fièvre » (Rimbaud notre prochain, Nouvelles éditions latines, 1956, p.111, cité par Georges Kliebenstein et Steve Murphy, op. cit. p.178)
  1. De tels papiers ornés du cône magique étaient suspendus au cou des malades par les thaumaturges des premiers siècles, d'après la savante notice des auteurs ci-dessus cités. « Écrivez, sorcières, / Abracadabra », dit Victor Hugo dans La Ronde du Sabbat (Odes et Ballades). La formule pourrait donc garder, dans notre poème, quelque chose de cette origine magique, le poète s'adressant aux « flots » pour être sauvé − le poète, peut-être, soulevant les flots, relevant les Déluges, comme on pourra lire plus tard dans Les Illuminations. Avec évidemment une distance humoristique, de la part de Rimbaud.

 

 « Quand ils auront tari leurs chiques12 ». Ce qui finira bien par arriver. Si vaillants qu’aient été les pioupious, ces sources se tarissent. 

12)   chique : les « chiques » étaient des morceaux de tabacs roulés ou tressés que l'on mâchait. Les marins étaient traditionnellement représentés en train de chiquer. Cette façon de consommer du tabac impliquait de devoir cracher de loin en loin le jus amer produit par la mastication, d'où le sens argotique de « tirer une chique » : tirer un coup, éjaculer.

 

« Ce seront des refrains bachiques13 ». L’adjectif vient de Bacchus, dieu du vin. Les refrains bachiques sont des chansons à boire, des chœurs d’ivrognes. En France, tout finit par des chansons… 

13)   Bachique : de Bacchus, dieu du vin; une chanson bachique est une chanson à boire.

 

« J’aurai des sursauts (ou des hoquets) stomachiques14 ». Même racine qu’estomac ; avoir des sursauts stomachiques, c’est vomir. Le poème s’achève sur un immense dégoût, qui va au-delà du supplice autobiographique. Le dégoût de l’adolescent est universel ; la médiocrité des autres et du monde hante ses textes. 

14)   Stomachique : de l'estomac.

 

« Si mon cœur triste est ravalé15 ! » Ravaler l’humiliation, il le faudra bien. Mais, depuis le premier vers, triste n’a pas quitté cœur.

15)   Ravalé : avalé de nouveau (re-avalé); au sens figuré : avili, rabaissé. Un exemple chez Rimbaud, dans Un cœur sous une soutane : le supérieur du Séminaire convoque le jeune Léonard pour le réprimander au sujet d'un poème licencieux écrit de sa plume; pour se moquer de son élève, le supérieur lit le poème à haute voix en bégayant : « Il ravalait ma poésie ! il crachait sur ma rose !  il faisait le Brid'oison, le Joseph, le bêtiot, pour salir, pour souiller ce chant virginal ! » (Pochothèque, page 145).

 

 « Comment agir, ô cœur volé ? » Remarquons la conception de la vie : agir. Un autre aurait écrit aimer, mais Rimbaud semble en avoir été à peu près incapable. – Suivra une période homosexuelle avec Verlaine, mais, en Afrique, les dix dernières années de sa vie, l’ex-poète s’est tourné vers les femmes.

Par Essentiel - Publié dans : Poesies
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